Recension de Hervé Joubert-Laurencin, Le Grand Chant. Pasolini poète et cinéaste (Macula, 2022), Europe n° 1125-1126, janvier-février, p. 362-364.
On trouvera dans ce blog les publications de Serge Martin et de Serge Ritman avec parfois des indications de commentaires (notes de lecture ou autres). Le nuage des libellés permet de les retrouver toutes selon les critères de genres, d'années, d'éditeurs... Le tout est un chantier permanent : il reste beaucoup à faire quant à l'exhaustivité...
mercredi 28 décembre 2022
Paul-Jean Toulet
Sandrine Bedouret-Larraburu, Isabelle Chol et Jérôme Hennebert (dir.), Paul-Jean Toulet, les « prismes » de l’écriture (Presses de l’Université de Pau et des pays de l’Adour, 2021), Europe n° 1125-1126, janvier-février, p. 353-354.
Cet ensemble, issu d’un colloque tenu à Pau et à Guéthary en septembre 2020, est d’abord original par son format. Ce dernier ressemble bien peu aux actes d’un colloque universitaire puisqu’adoptant un format vénitien, il offre de nombreuses photographies dont Toulet était un amateur averti et propose ainsi, entre textes et images, « une carte du tendre », ainsi que conclut David Bedouret à propos de ce « géo-photographe ». Expression qui sied parfaitement à l’œuvre de l’auteur resté célèbre pour ses Contrerimes. Celles-ci constituent le cœur de l’ouvrage avec trois fortes études qui permettent de relier le « phrasé » (Laurent Mourey), « l’envers du visible » (Michel Viegnes) et le « nom propre » (Jérôme Hennebert) d’un Toulet dont la spécificité poétique tient certainement à « l’éclat du bref » visant cependant non la clarté mais « une inquiétude dont le langage est la densité » pour peut-être « pointer un innommable ». Cette « poétique de la brièveté » traverse les genres chez Toulet, Peter Cogman montre que dans ses romans comme dans ses poèmes, cela tient à une quête de « résonance ». Même quand il mirlitonne, Toulet « tend à constituer la défaillance de la langue et du vers en événement poétique ». C’est ce que Isabelle Hérisson, dans une très belle étude, montre de près en observant comment « le sens traverse des lignes prosodiques qui doublent la syntaxe », et que Juliette Lormier relance avec les « hardiesses rythmiques » d’Entr’actes pour y faire apparaître « l’élégance inopinée de la discordance ». Mais « Toulet polygraphe » demandait aussi d’observer son journal (Michel Braud), son théâtre (Hélène Laplace-Claverie) et « les tribulations d’un Béarnais en Indochine » (Jean-Yves Puyo) non sans y noter la part tragique, et inaccomplie mais également la « frustration (pour le lecteur) »… si ce n’est des silences malheureux concernant le colonialisme français. Il était inévitable de rappeler le lien avec Jean Moréas, aussi Yves Piantoni note combien ce « couple demeure problématique » entre « cendre dans la bouche » et « « goût de miel suave » dans la cendre ! Cette « douceur des choses », Jean-Luc Steinmetz y revient en ouverture des actes pour rappeler combien Toulet demandait de la « décontenancer » par autant de paroles à voix basse, de « romances sans musique ». C’est donc bien par « l’ironie, ou le sourire doux-amer » (Maxime Colbert de Beaulieu) qu’il faut prendre Toulet tel qu’en lui-même, insolent et tendre à la fois comme disait son ami Henri de Régnier, travaillant à la retenue (« Petitoie-toi-même », écrivait-il !). On dira enfin que Toulet aurait échoué quant au roman, mais ne préfigure-t-il pas des tentatives peut-être plus heureuses chez ses successeurs quand, par exemple, il traite la narration « de manière elliptique » , « la description » lui permettant « en revanche des circonvolutions, qui rappellent que tout n’est que langage », d’autant qu’il réussit jusque dans sa prose romanesque à faire passer « ce déferlement sous-jacent de l’onde qui passe », ainsi que le rappelle avec précision Sandrine Bedouret-Larraburu reprenant une remarque de Francis de Miomandre, l’ami de Toulet.
Les écrivains mineurs, du moins ceux que l’histoire littéraire classe ainsi, ne sont-ils pas des prismes permettant de mieux concevoir les enjeux de l’écriture par les moyens d’une attention au spécifique et de renvoyer sur bien des œuvres, mêmes célèbres, quelque lumière inédite, car comme écrivait Toulet à propos du regard des enfants : « Tout ce qu’ils voient, serait-ce la plus fade lumière, leur prisme en fait de la pierrerie »…
Serge Martin
vendredi 25 novembre 2022
Deux poèmes avec des dessins de Jean Anguera
Deux poèmes avec des dessins de Jean Anguera
pluie de plis, dans ta main
immenses dans la plaine
argileuse les lignes
emmêlées de ta main
dans une pluralité de plis
où se perdre sans savoir
avec tout l’inconnu de ton
cri
il survient comme surgit
une alouette en travers
de l’horizon
ce peuple de silences
revenu en gerbe dans
ta main
ton air explosé, sous mes pas
je ne sais pas
si je verrai encore
le paysage de ta peau
quand se répète
l’immense germination sous
mes pas tu me
traverses dans les interstices
d’un grand vent
je vois l’air
de ton sourire explosé
et le grain de ta
beauté en plein milieu de nos
incertitudes
Albert Camus ou le poème dans et par la voix
« Une certaine voix : Albert Camus ou le poème dans et par la voix » dans Daniele Leclair et Alexis Lager, Camus et la poésie, Rennes, presses Universitaires de rennes, « Interférences », 2022, p. 85-93.
Camus en haute mer
« Camus en haute mer » dans Daniele Leclair et Alexis Lager, Camus et la poésie, Rennes, presses Universitaires de rennes, « Interférences », 2022, p.209-212.
vendredi 1 juillet 2022
Revue Catastrophes n° 34 et 35
« Phrases traversées par ta voix (1) », Catastrophes n° 34, mars 2022. En ligne : https://revuecatastrophes.wordpress.com/2022/03/02/phrases-traversees-par-ta-voix-1-2/
« Phrases traversées par ta voix (2) », Catastrophes n° 35, juin 2022. En ligne : :
https://revuecatastrophes.wordpress.com/2022/05/16/phrases-traversee-par-ta-voix-2-2/
lundi 3 janvier 2022
D'une diction éperdue
D’une Diction éperdue, Livre manuscrit en six exemplaires avec des graphismes de Jephan de Villiers.
D’une diction éperdue
le silence lance sa
courbe jusqu’à
frotter à l’os tendre
ment tous les mots
comme s’il saut-
ait dans le vide
immense d’un ar-
bre en plein vent
et ses deux yeux dans
un cercle où bruissait
tout un feuillage plein
de murmures et rires
pour écrire une
signature de partout
s’écrivent des quat-
rains de tourbillons
toutes les exclama-
tions d’une forêt
rassemblées au plus
vif d’un tracé
et les vagues puissantes
d’une diction éperdue
nous renversent sans
savoir dans l’inconnu
Dada : Djeddah
Dada : Djeddah, Livre manuscrit en deux exemplaires avec des polaroïds d’Éric Coisel, Collection Mémoires, 2021.
Dada : Djeddah
la slow attitude de Dada bleuit :
le sens unique rougit amer
Dada se voit pousser : de partout
l’arbre de l’inconnaissance
des éco-visibilités : pense Dada
derrière les moucharabiehs
impossible de se garer : dit Dada
quand le fourrage pend au soleil
le cœur dans le marbre : comme
un plongeoir dans la barbe à Dada
bronzer dans les zébrures : Dada
dans les rayons d’un septième ciel
un sang dit : du rouge du rouge
Dada au point d’eau téléphone
Dada aime : aller droit dans le mur
avec une conduite parabolique
flonflon et validisme : les deux
mamelles d’un Dada roulant
Dada et Dada sont sur un bateau :
il reste une place libre et un fardeau
tournez trois fois en rond : vous
entendrez Dada du fond des âges
en ralentissant Dada risque gros
dans une vie antérieure : à Djeddah
quand Dada fait du vitrail abstrait
les failles du visible répondent : vite
le masque lunaire : une soirée vide qui
met Dada dans tous ses états larvaires
Rose & Ros
Rose & Ros, Livre manuscrit en deux ex. avec photographies d’Éric Coisel, Collection Mémoires, 2021.
Rose & Ros
chanson rosse
Rose sait la vie
la ravie ose ça
son rose défait
hèle-la en vie
car l’éros tique
les poils de l’été
sous les cheveux
ivres en peine
de héros sans sel
c’est elle et cætera
etc. la rose c’est
Rrose Sélavy connaît bien le marchand du sel (Robert Desnos)
« La vie c’est
rosse », dit Ros